Construction : comment la responsabilité du maître d’ouvrage peut être engagée
Principe juridique : quand la responsabilité du maître d’ouvrage est engagée (art. 1792 C. civ.)
Dans les recours entre responsables, une part de la dette ne peut être laissée au maître d’ouvrage que si une faute est prouvée, ou s’il y a :
- immixtion fautive (compétence technique + actes d’ingérence),
- ou acceptation délibérée des risques (attitude passive mais informée).
Acceptation délibérée des risques : une mise en garde claire est indispensable
Dans l’arrêt du 10 juillet 2025 (Cass. 3e civ., n° 23-20.135, 23-20.147, 23-22.518), la Cour censure une décision qui avait imputé une part de responsabilité aux maîtres d’ouvrage simplement parce qu’ils avaient voulu « faire des économies » en renonçant à une étude de sol.
La Cour rappelle que la recherche d’économie ne suffit pas : il faut prouver que les maîtres d’ouvrage ont été clairement informés des risques par les professionnels.
Un exemple éclairant : dans l’arrêt du 7 novembre 2024 (Cass. 3e civ., n° 22-22.793), la Cour admet l’acceptation délibérée des risques lorsque le maître d’ouvrage écarte un avis défavorable du contrôleur technique et renonce à une étude de sol.

Immixtion fautive : compétence et actes concrets requis
Toujours dans l’arrêt du 10 juillet 2025, la Cour précise que le simple accord du maître d’ouvrage sur le choix d’une entreprise ne suffit pas à caractériser une immixtion fautive.
Il faut démontrer :
- une compétence technique reconnue,
- et des interventions concrètes dans l’exécution des travaux.
Comment les entreprises peuvent se protéger : garde-fous essentiels
Même si le maître d’ouvrage fait un choix discutable, l’entreprise ne peut pas se contenter d’exécuter des travaux qu’elle sait inefficaces. Elle a une responsabilité propre et doit refuser toute mise en œuvre techniquement inadaptée (Cass. 3e civ., 10 sept. 2020, n° 19-11.218).
La traçabilité des mises en garde est essentielle pour sécuriser la position de l’entreprise. Elle repose sur plusieurs types de documents :
- Réserves écrites,
- Avis du contrôleur technique,
- Notes d’ingénierie,
- Comptes rendus de réunion.
Ces éléments permettent :
- soit de démontrer que le maître d’ouvrage a accepté délibérément le risque, en connaissance de cause,
- soit d’établir la faute du constructeur, s’il n’a pas alerté malgré les risques identifiés.
En pratique, ces garde-fous jouent un rôle clé dans la répartition des responsabilités : ils protègent l’entreprise en cas de litige et permettent de documenter les échanges techniques et les décisions prises.

Conséquence sur la contribution entre coobligés
- Oui à une quote-part laissée au maître d’ouvrage si : faute prouvée, immixtion fautive ou acceptation délibérée du risque après information claire.
- Non dans les autres cas : la dette est répartie entre les constructeurs présents (Cass. 3e civ., 6 mars 2025, n° 23-18.093).
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Raphael Cerda

Raphael Cerda
Directeur Construction & Energie
Fort de près de 20 ans d'expérience dans l'assurance construction, Raphaël a occupé des postes à responsabilités croissantes chez Bouygues Construction, Marsh et Satec. Il rejoint désormais Howden France pour piloter le développement de la Ligne Produit Construction-Energie à l'échelle internationale.
Reconnu pour ses capacités de négociation et sa vision stratégique, Raphaël contribuera à positionner Howden France comme un acteur de référence sur le marché de l'assurance construction et énergie.
Expertises spécifiques : étanchéité, immobilier, grands chantiers
Diplômes :
- MASTER IAP / La Sorbonne
- DESS Droit des Assurances / La Sorbonne
- Executive MBA / PSL Paris Dauphine
- Executive MBA / UQAM Montréal










