Obligation de résultat du sous-traitant : contours, limites et jurisprudence

Sous-traitance : l’obligation de résultat au cœur de la responsabilité contractuelle

Dans un arrêt du 9 octobre 2025 (Cass. 3e civ., n° 23-23.924), la Cour de cassation rappelle avec fermeté un principe bien établi : le sous-traitant doit garantir  que le travail confié est entièrementréaliséconformémentauxattentes et aux engagements pris vis-à-vis de l’entrepreneur principal. Cela signifie que dès qu’un désordre est constaté, sa responsabilité est présumée, sauf s’il parvient à prouver qu’une cause étrangère est à l’origine du problème. 

« Le sous-traitant est tenu, à l’égard de l’entreprise principale, d’une obligation de résultat emportant présomption de faute et de causalité dont il ne peut s’exonérer, totalement ou partiellement, qu’en démontrant l’existence d’une cause étrangère. » 

Dans cette affaire, la Cour a censuré la cour d’appel de Montpellier, qui avait rejeté la demande d’indemnisation de l’entreprise principale au motif qu’aucun lien de causalité n’avait été prouvé. Or, la simple existence d’un désordre suffit à engager la responsabilité du sous-traitant, sauf preuve contraire de sa part. 

La Cour d’appel de Chambéry (15 avril 2025, RG 23/00014) a également rappelé une distinction importante :  le sous-traitant est contractuellement responsable envers l’entreprise principale (obligation de résultat) mais il est délictuellement responsable envers le maître d’ouvrage, en cas de faute prouvée. 

En clair, l’entreprise principale reste responsable des fautes de ses sous-traitants vis-à-vis du maître d’ouvrage, mais elle peut se retourner contre eux sur le fondement contractuel. Cette logique est constante dans la jurisprudence :l’entrepreneur principal est responsable des fautes de ses sous-traitants envers le maître d’ouvrage, même sans faute personnelle (Cass. 3e civ., 18 janv. 2024).  Le sous-traitant est tenu d’une obligation de résultat envers l’entreprise principale, sans qu’il soit nécessaire de prouver une faute intentionnelle (CA Rennes, 23 févr. 2023). 

Cette obligation s’applique aussi aux sous-traitants de second rang (Cass. 3e civ., 30 mars 2023). Le sous-traitant peut aussi voir sa responsabilité délictuelle engagée directement par le maître d’ouvrage, mais il n’est pas soumis aux garanties légales des articles 1792 et suivants (CA Versailles, 5 déc. 2022). Enfin, aucune responsabilité ne peut être retenue si le dommage survient après la résiliation du contrat d’assurance du sous-traitant (Cass. 3e civ., 6 juin 2024). 

À noter également : le sous-traitant a un devoir de conseil dans son domaine de compétence. Il doit alerter l’entreprise principale en cas d’anomalie ou d’insuffisance dans les documents contractuels (Cass. 3e civ., 10 nov. 2021). 

Batiment

Le devoir de conseil du sous-traitant : une exigence croissante en jurisprudence

Cette obligation de résultat s’accompagne d’un devoir de conseil renforcé, surtout lorsque le sous-traitant est un spécialiste.  Deux décisions récentes illustrent bien cette exigence : 

  • CA Rennes, 5 juin 2025 (RG 23/05873) : un sous-traitant spécialiste des sols industriels a été jugé responsable pour ne pas s’être renseigné sur les conditions d’exploitation du sol commandé. Il aurait dû vérifier les performances attendues du revêtement et alerter l’entreprise principale. 
  • CA Orléans, 24 avril 2025 (RG 22/02615) : un sous-traitant ne peut pas se contenter d’exécuter une prestation inadaptée. Il doit formuler des réserves ou proposer des alternatives s’il constate une faiblesse technique dans la solution retenue. 

Ces décisions montrent que le sous-traitant ne peut pas se retrancher derrière une exécution « conforme » si celle-ci est manifestement inadaptée. Il doit faire preuve de vigilance et de proactivité. 
 

Obligation de résultat du sous-traitant : une présomption contestable

Même si l’obligation de résultat est stricte, elle n’est pas absolue. Le sous-traitant peut s’exonérer de sa responsabilité en prouvant une cause étrangère. 

Par exemple :  La faute du maître d’ouvrage peut constituer une cause d’exonération. Dans un arrêt du 4 mars 2021 (Cass. 3e civ., n° 19-23.502), la Cour a retenu que le maître d’ouvrage, professionnel, n’ayant émis aucune réserve sur des documents techniques non conformes, avait contribué au dommage. 

Le sous-traitant n’est pas responsable des désordres causés par des tiers ou par l’entrepreneur principal lui-même (Cass. 3e civ., 13 juill. 2017, n° 16-18.136).  Enfin, il faut prouver une non-conformité pour engager la responsabilité du sous-traitant. À défaut, aucune faute ne peut lui être reprochée (Cass. 3e civ., 5 mars 2020, n° 18-26.584). 

En résumé : la responsabilité du sous-traitant est présumée en cas de désordre, mais il peut s’en exonérer s’il démontre une cause étrangère, une faute du maître d’ouvrage ou une intervention extérieure. 

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Raphael Cerda

Directeur Construction & Energie
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Raphael Cerda

Directeur Construction & Energie

Fort de près de 20 ans d'expérience dans l'assurance construction, Raphaël a occupé des postes à responsabilités croissantes chez Bouygues Construction, Marsh et Satec. Il rejoint désormais Howden France pour piloter le développement de la Ligne Produit Construction-Energie à l'échelle internationale.

Reconnu pour ses capacités de négociation et sa vision stratégique, Raphaël contribuera à positionner Howden France comme un acteur de référence sur le marché de l'assurance construction et énergie.

Expertises spécifiques : étanchéité, immobilier, grands chantiers

Diplômes :
- MASTER IAP / La Sorbonne
- DESS Droit des Assurances / La Sorbonne
- Executive MBA / PSL Paris Dauphine
- Executive MBA / UQAM Montréal

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